Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/180

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pouvait concentrer contre la forteresse ; partout il avait trouvé des feux doubles des siens. Pendant trois nuits, sans un instant de répit, l’affreux tapage continua, la place reçut plus de vingt mille projectiles. En dernière ressource, les assiégeants firent approcher les vaisseaux de second rang, à cinq cents toises de la ville, et de là ils crachèrent leur mitraille.

— Abritez vous de ce côté, dit Dupleix ; ne répondez pas, et laissez-les faire leur vacarme.

Il n’eut d’autre résultat, en effet, que de tuer une pauvre vieille femme malabare qui passait dans la rue.

Devant le peu de succès de leurs efforts, les Anglais perdaient décidément courage. On intercepta une lettre de l’amiral qui montrait de la fureur ; les espions et les déserteurs parlaient de la levée du siège. Dupleix cependant s’attendait à une attaque désespérée et il faisait rentrer prudemment les canons des batteries trop avancées, quand, dans la quatrième nuit, on vint lui annoncer que les Anglais enlevaient le matériel de siège et se repliaient vers le fort Saint-David.

— Ne les laissons pas déménager comme cela, sans leur dire un mot d’adieu, s’écria le gouverneur plein de joie.

On se lança à leur poursuite, on les harcela, on mit le feu au camp qu’ils abandonnaient, et, au matin, on aperçut les dernières files de l’arrière-garde s’éloignant en hâte, et les vaisseaux prenant le large[1].

  1. 6 octobre 1748.