Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/179

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Kerjean. Mme Dupleix a des espions même parmi les cipayes anglais : elle en a partout, et d’une fidélité incroyable. Voici les plus récentes nouvelles : le nabab Allah-Verdi a promis un renfort de deux mille cavaliers à nos ennemis.

— Comment ! malgré le traité de paix signé avec nous ?

— Oh ! les traités n’ont aucune importance pour ces gens-là, quand leur intérêt est de les rompre. Et puis Marlborough a fait, paraît-il, des cadeaux magnifiques ; cela joint à l’espoir d’être vengés de la honteuse défaite que nous leur avons infligée, c’est plus qu’il n’en fallait pour décider les Maures à trahir. Ceci est la mauvaise nouvelle. La bonne, c’est que nos vaisseaux, au nez des Anglais, sont parvenus à jeter trois cents hommes de renfort dans Madras.

— À la bonne heure ! Madras en état de tenir, c’est un grand souci de moins pour Dupleix. Mais je vous quitte à présent, ami, car je ne m’appartiens pas. Ayez patience, et à bientôt.

Le lendemain, en effet, dès que le jour parut, le bombardement commença, avec une violence formidable. Les Anglais, voyant leur faute, avaient élargi leur attaque du côté du nord, et les coups portaient maintenant en plein sur le bastion Saint-Joseph et la porte de Valdaour. Dupleix y courut aussitôt, ordonna de renforcer encore l’artillerie sur ces deux points, et, comme les sacs de terre manquaient, il fit blinder, avec des troncs de cocotiers, les escarpes qui s’écroulaient.

Pas un instant le tir des remparts ne se ralentit.

Boscawen avait démasqué tous les canons qu’il