Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/275

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laissant libre la voie centrale, et la foule bruyante et brillante des curieux se brise contre leurs lignes inébranlables.

Sur le sol de la voie libre sont étendus des tapis de Perse, dont les délicates nuances luttent de finesse avec les fleurs naturelles jetées sur eux. Dans les rues peu larges, des guirlandes traversent, d’une maison à l’autre, et, le long des avenues, les grands arbres ont leur tronc drapé de soie, et des banderoles frissonnent dans leurs branches, où tous ceux qui savent grimper se sont installés.

Le camp du Soubab étant établi sur les rives fraîches de l’Ariancopan, c’est par la porte de la Reine que le cortège de Mouzaffer doit venir.

Tous les regards se braquent du même côté, tous les cous sont tendus, et l’attente a déjà paru longue, quand accourent, enfin, des hérauts à cheval, sonnant de leurs longues trompettes à tablier de pourpre frangé d’or.

Les troupes musulmanes parurent alors, et défilèrent longtemps, avec un cliquetis et des éclairs d’acier. Les cavaliers mahrattes suivaient, faisant cabrer leurs montures, qui secouaient l’écume sur les mors ornés de turquoises. L’artillerie vint après, avec les canonniers montés sur des dromadaires ; puis ce furent les garaouls, portant, appuyés sur leur épaule, une longue et lourde épée nue.

Un orchestre : timbales, tam-tam, clairons et trompettes, hurlant et grondant, précédait l’Alfaraz, assis sur un éléphant, et qui tenait des deux mains, la maintenant droite et haute, la hampe d’un vaste éten-