Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/343

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Mais, va, cette fois-ci, le bonheur est si grand de vivre plusieurs jours auprès d’elle, d’être dans son palais, de la voir et de l’entendre, que je ne veux pas songer au désespoir qui suivra, et sera la fin de tout.

— Combien je partage cette joie, ce triomphe, dit Lila, te voir ici fêté, reçu comme un égal ; tous les préjugés écrasés sous ta gloire ! Ah ! tu peux être fier, car la victoire était malaisée.

— Elle est aussi ton œuvre, ma généreuse alliée, et j’ai plus de gratitude que d’orgueil.

— Ourvaci avoue enfin avoir honte de son premier accueil, et cela va te le faire oublier, dit la princesse ; mais je ne puis demeurer plus longtemps. Prends patience, demain aura lieu la réception solennelle de l’ambassadeur, et ensuite viendront les fêtes, où tu la verras sans contrainte.

Elle étendit le bras vers un point du palais.

— Surveille cette terrasse, celle aux angles de laquelle flottent des étendards ; la reine y paraîtra pour la prière du soir et tu pourras l’apercevoir ; c’est elle qui la dernière salue le départ du soleil.

— Que tu es bonne de me donner cet avertissement ! dit-il en lui pressant la main ; quel trésor merveilleux qu’un cœur comme le tien !

Lila jeta sur lui un regard voilé de tristesse et retint un soupir.

— Viens, rentrons, dit-elle.

Il la suivit, quittant à regret cette terrasse et regardant avec inquiétude le soleil, qui touchait presque l’horizon.

Les salles étaient pleines encore de courtisans et