Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/370

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que tu as si imprudemment laissé prendre au ministre.

— Je ferai ainsi, Lila, et personne ne connaîtra ma réponse au roi du Dekan avant que l’ambassadeur soit hors d’atteinte. Je tâcherai, puisqu’il le faut, de mieux garder mon secret ; mais s’il allait s’en attrister ?

— Ne suis-je pas là ? dit la princesse, déjà je l’ai averti, mais il est de ceux, malheureusement, que le danger attire.

Le lendemain, après le conseil, auquel l’ambassadeur assistait, et où la reine fit connaître les propositions du soubab et l’accroissement inespéré du territoire de Bangalore, Panch-Anan, rentrant chez lui, très préoccupé, aperçut dans la cour de son palais les pages et la litière de la princesse Mangala ; il pressa le pas et gagna la salle où elle l’attendait.

— Victoire au ministre ! dit la princesse, en portant ses mains à son front.

— Qu’est-ce donc, ma fille, qui t’amène si matin chez moi ? dit le brahmane.

— La découverte du plus étonnant mystère, mon saint gourou. Mon amour pour notre reine me pousse à te le révéler, afin que tu puisses la protéger et la sauver. Les dieux sont au pouvoir des prières, les prières sont au pouvoir des brahmanes, donc les brahmanes sont dieux et rien ne doit leur être caché.

— Parle sans détour, ma fille ; je connais ton dévouement et je saurai le récompenser, dans ce monde-ci, et dans les existences suivantes.

— Eh bien, père, le barbare est un magicien bien puissant, car il est parvenu à se faire aimer de la reine.