Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/371

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— Qui t’a dit cela ? s’écria Panch-Anan, en changeant de couleur.

— On s’est bien gardé de me le dire, répondit Mangala, mais j’ai surpris entre la reine et l’ambassadeur des regards et des échanges de signes qui ne me laissent pas de doute.

— Ce que je redoutais si fort est donc arrivé ! dit le brahmane, les sourcils froncés ; je comprends à présent : c’est ce maudit barbare qui a décidé le soubab à laisser la reine libre de rompre ou de tenir les promesses de fiançailles : nouvelles qu’elle vient seulement de nous apprendre au conseil.

— Alors, la régence t’échappe ?

— Peut-être. La reine a déclaré qu’elle ne savait quelle réponse elle ferait. Mais elle nous trompe, sans doute, et est décidée à refuser.

— Un trône comme celui du Dekan, auprès du petit royaume de Bangalore, mérite bien qu’on hésite, dit Mangala.

— Mais Bangalore vient d’être doublé en importance ; à la demande du barbare, que l’impur musulman traite de frère, tout l’ancien territoire nous est rendu. N’est-ce pas là un signe que le roi du Dekan verrait d’un œil favorable une alliance de la reine avec son ambassadeur ?

— Ah ! mon père, un pareil sacrilège ne peut pas avoir lieu, s’écria la princesse avec épouvante. Si la reine a laissé surprendre son cœur par la magie, elle n’est pas folle au point d’oublier son rang et sa caste.

— Je la connais : elle est extrême en tout ; cet