Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/386

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guirlande assez mal tressée par le marquis et dont quelques fleurs se détachaient, et Ganésa était couronné par celle qu’avait formée la reine. Ils revinrent à la ville par la forêt.

Le peuple de Bangalore les attendait. Durant la journée, des hérauts, appelant les habitants sur toutes les places, leur avaient lu le firman qui rendait à la couronne le territoire perdu, ajoutant que c’était sur la prière de l’ambassadeur, auquel le roi du Dekan avait été heureux d’accorder cette faveur. En secret, Ourvaci avait fait répandre le bruit, par d’habiles agents, que ce bienfaiteur du royaume était le même homme qui, en risquant la sienne, avait sauvé la vie à la reine, quelques années auparavant. Elle voulait savoir si l’amour que lui portait son peuple serait assez fort pour faire taire en lui les préjugés de race et de religion, et quel accueil il ferait, de son propre mouvement, à l’ambassadeur du soubab, quand il saurait combien il avait droit à sa reconnaissance.

Par une de ces intuitions que les foules ont quelquefois, le secret désir de la reine sembla avoir été deviné par le peuple, qui fit spontanément à l’ambassadeur, une ovation enthousiaste, jetant des palmes sur sa route, arrosant de musc et d’eau de roses les oreilles de son éléphant et couvrant le nom de l’étranger de bénédictions et de louanges.

Bussy, surpris et touché de ce chaleureux accueil, saluait cette foule et lui souriait.

— Ah ! Lila, dit Ourvaci, pâle et tremblante de joie, lorsqu’on atteignit le palais, ne dirait-on pas qu’ils acclament le roi ?