Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/41

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— La reine de Bangalore ? serait-ce elle que j’ai eu îe bonheur de secourir, aujourd’hui ? demanda vivement Bussy.

— Je n’en sais rien.

— N’a-t-elle pas chassé ?

— C’est possible.

— Dis, dis, que sais-tu d’elle ?

Et Bussy se penchait avidement vers le paria toujours agenouillé, qui répondit :

— D’elle à moi bien peu de chose peut arriver ; pourtant la pluie tombe pour le dernier des insectes, et j’ai recueilli quelques gouttes de sa renommée. On la dit brave comme un guerrier et savante comme un brahmane ; son père et ses deux frères ont été tués dans un combat contre un chef mahratte, elle était l’unique enfant qui restait et a succédé à son père. La couronne lui pèse sans doute, car elle est fiancée à un prince mogol.

— Fiancée ?

Il eut un serrement de cœur et tomba dans une rêverie.

Après un moment, Naïk reprit :

— Si c’est elle que tu as sauvée, seigneur, si tu as risqué ta vie pour elle, comment se peut-il qu’on t’ait conduit ici, dans le quartier des esclaves ? Cet abri est un hangar abandonné.

— Pourquoi donc ? pourquoi ? s’écria Bussy. Est-ce ainsi que l’on traite un hôte ?

— Non, ce n’est point ainsi, fût-ce même un ennemi mortel. Précipitamment on a apporté ici des coussins pour former ce lit ; on a appelé pour te