Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/429

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cacher sa douleur, et l’horrible projet qu’elle nourrissait, sous un impénétrable masque.

— Oh ! Lila, toi si loyale, pourquoi vouloir me tromper ? Ne m’as-tu pas écrit toi-même que les brahmanes lui ont fait jurer ma perte.

— Ai-je dit cela ? J’ai bien regretté cette lettre, écrite dans un moment d’affolement. Je t’en ai envoyé d’autres, malgré la défense de la reine, mais les messagers ont été arrêtés. Ce qu’elle a juré, je l’ai su plus tard, c’était de renoncer à toi si on lui faisait en retour serment de ne pas attenter à ta vie. Panch-Anan lui disait que tu étais condamné, mais qu’elle pouvait te sauver à ce prix, II a juré qu’il t’épargnerait, et l’infâme, à ce moment même, te faisait verser le poison,

— Ah ! je ne peux plus croire, je ne veux pas t’écouter, disait le marquis en se détournant d’elle ; toi aussi, peut-être, tu cherches à m’abuser.

— Il doute de moi maintenant ! murmura la princesse ; il hésite ! alors tout est perdu !

Arslan était entré depuis un instant, et Naïk joyeux avait montré d’un geste la nouvelle venue.

— Elle arrive de Bangalore, dit-il, elle apporte le salut.

— Mais cette pauvre femme se trouve mal ! s’écria Arslan s’élançant vers Lila pour la soutenir ; vous ne voyez donc pas qu’elle chancelle, épuisée de fatigue ?

Il la conduisit au divan, où la princesse tomba inanimée.

On s’empressa autour de la princesse, et Arslan