Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/442

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par les mille bouches du peuple éclatèrent, tellement formidables qu’on eût dit que le ciel tombait.

— Victoire ! victoire ! l’époux revient, le héros la sauvera !

Elle entendait distinctement ces phrases, mais, perdue dans la nuée étouffante, elle ne voyait plus rien, et courait d’un bord à l’autre du bûcher les bras étendus, cherchant à se dégager de cet horrible engloutissement. Le souffle lui manquait, ses yeux brûlants avaient peine à s’ouvrir et elle allait s’abandonner, quand elle vit entrer dans la fumée, un cheval couvert d’écume et de sang, l’œil fou de terreur, et portant le cavalier chéri, qui la saisit dans ses bras, l’enleva.

Mais alors, l’effrayante figure de Panch-Anan, grinçant de rage, apparut, s’accrochant au sauveur, l’entravant, s’efforçant de le faire tomber. Comme on repousse une bête immonde, d’un violent coup de pied, Bussy envoya son ennemi rouler au milieu du bûcher et disparut hors du nuage.

Aux cris affreux du brahmane appelant à l’aide, des rires seuls répondirent. Panch-Anan parvint un instant à se relever pour fuir ; mais un guerrier, du bout de sa lance, le repoussa ; il le reconnut, c’était Arslan-Khan.

— Je ne suis pas fâché d’être de moitié dans la vengeance, dit le musulman, puisque je n’ai pu l’accomplir seul. Va, va, hideux monstre, rends ta vilaine âme à Iblis !

Le feu crépitait, clair et vif à présent. Panch-Anan poussa un râle horrible, la flamme le mordait, fit écla-