Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/216

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Après tout, la terre d’Égypte est fertile en soldats ; d’innombrables chevaux hennissent et fouillent le sol du pied dans les écuries du palais, et les ouvriers ont bientôt courbé le bois, fondu le cuivre, aiguisé l’airain ! La fortune des combats est changeante ; un désastre se répare ! mais avoir souhaité une chose qui ne s’était pas accomplie sur-le-champ, rencontré un obstacle entre sa volonté et la réalisation de cette volonté, lancé comme une javeline un désir qui n’avait pas atteint le but : voilà ce qui étonnait ce Pharaon dans les zones supérieures de sa toute-puissance ! Un instant il eut l’idée qu’il n’était qu’un homme !

Il errait donc par les vastes cours, suivant les dromos de colonnes géantes, passant sous les pylônes démesurés, entre les obélisques élancés d’un seul jet et les colosses qui le regardaient de leurs grands yeux effarés ; il parcourait la salle hypostyle et se perdait à travers la forêt granitique de ses cent soixante-deux colonnes hautes et fortes comme des tours. Les figures de dieux, de rois et d’êtres symboliques peintes sur les murailles semblaient fixer sur lui l’œil inscrit de face en lignes noires sur leur masque de profil, les uræus se tordre et gonfler leur gorge, les