Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/223

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De cette hauteur, le roi dominait sa ville déployée à ses pieds. Du sein de l’ombre bleuâtre jaillissaient les obélisques aux pyramidions aigus, les pylônes, portes gigantesques traversées de rayons, les hautes corniches, les colosses émergeant jusqu’aux épaules du tumulte des constructions, les propylées, les colonnes épanouissant leurs chapiteaux comme d’énormes fleurs de granit, les angles des temples et des palais révélés par une touche argentée de lumière ; les viviers sacrés s’étalaient en miroitant comme du métal poli, les sphinx et les criosphinx alignés en dromos allongeaient leurs pattes, évasaient leur croupe, et les toits plats se succédaient à l’infini, blanchissant sous la lune en masses coupées ça et là de tranches profonde ; par les places et les rues : des points rouges piquaient cette obscurité bleue, comme si les étoiles eussent laissé tomber des étincelles sur la terre ; c’étaient les lampes qui veillaient encore dans la ville endormie ; plus loin, entre les édifices moins serrés, de vagues touffes de palmiers balançaient leurs éventails de feuilles ; au-delà les contours et les formes se perdaient dans la vaporeuse immensité, car l’œil de l’aigle même n’aurait pu atteindre aux limites de Thèbes, et de l’autre côté le vieil Hôpi-