Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/233

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silencieusement avaient l’air de préparer des questions.

Cette inconnue ramassée à la porte de la cabane l’intriguait vivement ; d’où venait-elle ? comment se trouvait-elle là ? dans quel but ? qui pouvait-elle être ? Telles étaient les demandes que se posait Thamar, et auxquelles, à son grand regret, elle n’imaginait pas de réponses satisfaisantes. Il faut dire aussi que Thamar, comme toutes les vieilles femmes, avait une prévention contre la beauté ; et, sous ce rapport, Tahoser lui déplaisait. La fidèle servante pardonnait à sa maîtresse seulement d’être jolie, et cette beauté, elle la considérait comme sienne : elle en était fière et jalouse.

Voyant que Ra’hel gardait le silence, la vieille se leva, vint s’asseoir près d’elle, et faisant clignoter ses yeux, dont la paupière bistrée s’abaissait et s’élevait comme une aile de chauve-souris, elle lui dit à voix basse et en langue hébraïque :

« Maîtresse, je n’augure rien de bon de cette femme.

— Et pourquoi, Thamar ? répondit Ra’hel sur le même ton et dans le même idiome.

— Il est singulier, reprit la défiante Thamar, qu’elle se soit évanouie là, et non ailleurs.