Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/306

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croyant déjà enveloppé par l’ombre impénétrable du sépulcre, errait à tâtons ou s’asseyait le long des propylées, poussant des cris plaintifs et déchirant ses habits.

Une nuit, nuit d’épouvante et d’horreur, un spectre vola sur toute l’Égypte, entrant dans chaque maison dont la porte n’était pas marquée de rouge, et tous les premiers-nés mâles moururent, le fils de Pharaon comme le fils du plus misérable paraschiste ; et le roi, malgré tous ces signes terribles, ne voulait pas céder.

Il se tenait au fond de son palais, farouche, silencieux, regardant le corps de son fils étendu sur le lit funèbre à pieds de chacal, et ne sentant pas les larmes dont Tahoser lui baignait les mains.

Mosché se dressa sur le seuil de la chambre sans que personne l’eût introduit, car tous les serviteurs s’étaient enfuis de côté et d’autre, et il répéta sa demande avec une solennité imperturbable.

« Allez ! dit enfin Pharaon ; sacrifiez à votre Dieu comme il vous conviendra. »

Tahoser sauta au cou du roi et lui dit :

« Je t’aime maintenant ; tu es un homme, et non un dieu de granit. »