Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fossoyeur dans Hamlet ; vous bêchez mal, mon maître.

La nuit était presque tombée lorsque le comte eut terminé son lugubre travail.

— Aux épées maintenant, c’est assez pioché comme cela ! dit le comte en en jetant une à Dolfos et en gardant l’autre pour lui.

— Il ne fait plus clair, cria le misérable ; allons-nous donc nous égorger à tâtons ?

— On y voit toujours assez clair pour se tuer. Passer de la nuit à la mort est une transition facile ; si noir qu’il fasse, nous sentirons bien toujours nos épées nous entrer dans le corps, dit le comte en portant une botte terrible à Dolfos qui poussa un gémissement.

— J’ai touché, dit le comte, la pointe de mon épée est mouillée.

Dolfos, exaspéré, se fendit à fond sur le comte.

Volmerange para le coup par une prompte retraite, et liant son fer avec celui de son adversaire, lui fit sauter l’épée des mains.

Se voyant perdu, Dolfos se jeta par terre, s’aplatissant comme un tigre, saisit Volmerange par les jambes et le fit tomber.

Alors commença une lutte affreuse. Serré par l’étreinte furieuse de Dolfos, dont la lâcheté au désespoir se tournait en rage de bête fauve, Volmerange ne pouvait se servir de son épée. Il essaya bien d’abord de la planter dans le dos de Dolfos, dût-il en clouant son adversaire sur lui se traverser le cœur, mais il ne put y réussir, le fer lui échap-