Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/209

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Ce ne fut pas cette ombre convulsive dont la blancheur perçait les ténèbres qu’encadra la porte de la cabine en s’ouvrant, mais un jeune homme mince et de taille moyenne, vêtu d’une cotte et d’une chemise de mousse : ses traits délicats et fins se dessinaient dans un ovale d’une pâleur extrême ; ses yeux marbrés luisaient fiévreusement, et sa bouche abandonnée des couleurs de la vie, tranchait à peine sur le ton du reste de la peau. Une certaine confusion perçait à travers sa tristesse, et lorsque Sidney leva les yeux vers lui, une légère rougeur pommela ses joues.

Un certain étonnement se peignit dans le regard de Sidney, qui attendait une femme et voyait paraître un mousse. Mais Jack, qui marchait derrière le prétendu jeune homme, comprit cette surprise et la fit cesser.

— Madame n’était, lorsque nous l’avons tirée de l’eau, vêtue que d’un simple peignoir de mousseline, et comme nous n’avons pas ici un assortiment de vêtements de femme, j’ai mis à côté de son hamac cette chemise de laine rouge et cette cotte goudronnée. Voilà pourquoi la femme repêchée se trouve être un joli mousse.

— C’est bien, Jack, laissez-nous, dit sir Arthur Sidney avec un signe impératif.

Sidney, resté seul avec Edith, fixa sur elle un œil scrutateur aussi perçant que celui de l’aigle ; ce n’était pas un regard, c’était comme un jet lumineux qui semblait aller chercher à travers le crâne ou la poitrine l’idée dans la cervelle et le sentiment dans le cœur.

Edith resta impassible pendant cet examen qui