Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/245

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sées par l’éléphant qui portait la triade de Volmerange, de Dakcha et de Priyamvada, vinrent reconnaître, et nos héros pénétrèrent dans le centre du campement.

C’était un spectacle des plus singuliers, à vous reporter au temps des guerres de Darius et d’Alexandre.

Un grand feu, entretenu par des broussailles, des branches et des arbres brisés, répandait dans les voûtes feuillues de la forêt une clarté fantasmagorique.

Autour du feu, rangés en cercle, cinquante éléphants, éclairés pittoresquement en dessous, se tenaient immobiles, graves et pensifs comme Genesa, le dieu de la sagesse. À peine s’ils faisaient frissonner les plis de leurs larges oreilles, et si de temps à autre leur trompe inquiète, subodorant dans le lointain quelque tigre en maraude ou quelque ennemi cherchant à se glisser dans le bois, ne se fût relevée vers le ciel, on eût pu les croire sculptés dans le granit comme ceux qui ornent les pagodes. Leurs dos étaient chargés de tours et leurs défenses armées de cercles de fer pour ne pas se rompre dans les chocs.

Plus loin se groupaient les Mahrates et les autres Indiens couchés à côté de leurs chevaux et près de leurs armes suspendues aux autres arbres.

Volmerange et les deux amis n’étaient pas encore descendus de leur haute monture, qu’un cri plaintif se fit entendre, cri auquel succéda une immense clameur. Les éléphants s’agenouillèrent d’eux-mêmes pour recevoir leurs maîtres, les