Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/244

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sait une liane ou une branche qui eût gêné le passage, ou bien si le chemin était trop étroit, il appuyait sa forte épaule contre le tronc d’arbre qui l’obstruait et frayait la route ; d’autres fois il couchait sous ses pieds les bambous qui cassaient avec un bruit sec ou ployaient comme l’herbe.

Priyamvada couchée dans le palanquin posé sur le dos de l’animal, s’était assoupie sur la poitrine de Volmerange, beaucoup plus grand qu’elle, comme ces mignonnes statues de déesses que les dieux tiennent dans leurs bras ; comme Parvati sur le sein de Mahadeva, Lakshmi sur celui de Wishnou, et Sarawasti contre le cœur de Brahma. Volmerange restait immobile de peur de troubler la belle enfant, et regardait l’étrange paysage qui se massait obscurément devant lui et prenait dans l’ombre des formes encore plus bizarres. Des caroubiers, des figuiers des Banians, des boababs contemporains de la création, des mangliers, des palmiers enchevêtraient leurs branches à travers lesquelles, comme sous une noire découpure, scintillait subitement quelqu’étoile ou quelque morceau du ciel nocturne.

Assis à côté du cornac, Dakcha marmotait dévotement quelque oraison pour le succès de l’entreprise.

Des lueurs rougeâtres, au bout de deux heures de marche, commencèrent à briller dans les entrecolonnements des troncs d’arbre.

On approchait du camp, où déjà s’étaient réunis les premiers révoltés ; les sentinelles, entendant le froissis des feuilles et des branches repous-