Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/47

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étroit boyau miroitaient à hauteur d’homme, par les tâtonnements successifs des mains grasses qui avaient cherché leur chemin dans son ombre. Le sol était couvert d’un enduit de boue gluant par places, calleux dans d’autres, qui témoignait du passage d’un grand nombre de semelles crottées. Au bout de quelques pas, la lumière avare qui filtrait par les carreaux jaunis de l’imposte s’éteignait, et il fallait marcher assez longtemps dans la nuit la plus profonde. Le corridor traversait probablement des maçonneries compactes et ne pouvait s’éclairer même par des jours de souffrance ; peut-être même, en de certains endroits, était-il complétement souterrain, à en juger du moins par l’eau qui suintait des pierres.

L’homme qui eût suivi ce couloir pour la première fois eût été bien vite désorienté par les nombreux coudes qu’il faisait, et n’aurait pu en deviner la direction.

L’inconnu, précédé du singulier personnage aux vêtements couleur de muraille, marchait de ce pas ferme mais prudent, où un pied ne quitte la terre que quand l’autre est bien appuyé, non qu’il pût redouter quelque piége, quelque trappe à bascule, puisque le guide passait devant lui, mais il ressentait cette appréhension vague qu’inspirent aux plus braves l’obscurité et le froid sous une voûte basse entre deux murailles étroites.

Par un mouvement instinctif, ses mains avaient cherché sous son manteau si ses deux petits pistolets de poche étaient bien à leur place.

À une assez grande distance au fond de l’ombre, quelques raies rougeâtres commençaient à se des-