Page:Gautier - Les Deux Etoiles.djvu/83

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ment sur lui. Le dernier regard du misérable fut celui d’un serpent qui sent entrer dans son dos la griffe d’un lion.

Elle repoussa les verrous et remit le meuble en place, et le dernier pas de Xavier résonnait encore sur l’escalier que lord et lady Harley entrèrent dans la chambre.

La colère avait ramené les couleurs de la vie sur les joues d’Edith, et le feu de l’indignation cache toute trace de pleurs dans ses yeux brûlants : le calme des résolutions suprêmes rassérénait son front.

Aussi, lady Harley, en attirant sa fille sur son cœur, lui dit-elle d’une voix caressante :

— Edith, mon enfant, je suis charmée de te voir sortie de l’abattement où tu étais plongée. Je craignais que ce mariage ne te déplût et qu’une vaine crainte de revenir sur ta résolution au dernier moment ne t’engageât seule à l’accomplir. Je n’aurais pas voulu qu’une considération mondaine compromît le bonheur de ta vie. Lord Harley, bien qu’il trouve dans M. de Volmerange toutes les qualités qu’on peut souhaiter d’un gendre, était venu avec moi dans l’idée de t’engager à ne pas former une union qui te trouble et t’agite à ce point.

Au moment de serrer avec ton respectable père le lien qui nous rassemble, je n’éprouvai rien de pareil : une confiance inaltérable, une sérénité céleste, une joie calme et pénétrante emplissaient mon âme. Tel doit être le sentiment qui anime une jeune fille quand elle va s’unir à celui qu’elle