Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/217

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elle. (À part.) Il y a plus de passion véritable dans cette pauvre fille que dans vingt mijaurées de cette espèce, et d’ailleurs elle est plus jolie.

mariette. — Vous me promettez donc…

rodolphe. — Sur tes yeux et ta bouche.

mariette, avec explosion. — Je reste !

rodolphe. — Çà ! notre chambrière, maintenant que vous voilà promue au grade de notre maîtresse en titre, cherchez quelqu’un qui vous remplace et fasse votre ouvrage.

mariette. — Non, Rodolphe, je veux être ici seule avec vous, et d’ailleurs je vous aime trop pour laisser le soin de vous servir à une autre.

rodolphe. — Tu es une bonne fille et je suis un grand sot d’avoir été chercher si loin le trésor que j’avais chez moi. Je t’aime de cœur et de corps, je me sens en humeur tout à fait pastorale, et nous allons refaire à nous deux les amours de Daphnis et Chloé. (Il la prend sur ses genoux et la berce comme un petit enfant.)

Intrat albert, l’homme positif. — Voilà un groupe qui se compose assez bien ; mais je doute fort qu’il fût du goût de madame de M***, si elle le voyait.

rodolphe. — Je voudrais qu’elle le vît.

albert. — Tu ne l’aimes donc plus ?

rodolphe. — Est-ce que je l’ai aimée ?

albert. — À vrai dire, j’en doute. Et ta passion d’artiste ?

rodolphe. — Au diable la passion ! je courais après elle, elle est venue chez moi.