Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/307

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

bout de l’aile un bouton d’or, une pâquerette ployée au vent, j’irais, je courrais du brin d’herbe au bouleau, du bouleau au chêne, tantôt dans la nue, tantôt rasant le sol, égratignant les eaux transparentes de la rivière, dérangeant dans les feuilles de nénufar les criocères écarlates, effrayant de mon ombre les petits goujons qui s’agitent frétillards et peureux…

« Au lieu d’un trou dans la cheminée, j’aurais pour logis la coupe d’albâtre d’un lis, ou la campanule d’azur de quelque volubilis, tapissée à l’intérieur de perles de rosée. J’y vivrais de parfums et de soleil, loin des hommes, loin des villes, dans une paix profonde, ne m’inquiétant de rien, que de jouer autour des roseaux panachés de l’étang, et de me mêler en bourdonnant aux quadrilles et aux valses des moucherons… »

J’allais commencer une autre phrase, quand Maria m’interrompit.

— Ne te semble-t-il pas, dit-elle, que le cri du grillon a tout à fait changé de nature ? J’ai cru plusieurs fois, pendant que tu parlais, saisir, parmi ses notes, des mots clairement articulés ; j’ai d’abord pensé que c’était l’écho de ta voix, mais je suis à présent bien certaine du contraire. Écoute, le voici qui recommence.

En effet, une voix grêle et métallique partait de la loge du grillon :

— Enfant, si tu crois que je m’ennuie, tu te trompes étrangement : j’ai mille sujets de distrac-