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trées sur le haut des pommettes en petit nuage rose, ajoutaient encore à l’éclat divin de ces yeux surnaturels où se concentrait une vie près de s’envoler ; les anges du ciel semblaient regarder la terre par ces yeux-là.

À l’exception de ces deux taches vermeilles, elle était pâle comme de la cire vierge ; ses tempes et ses mains transparentes laissaient voir un délicat lacis de veines azurées ; ses lèvres décolorées s’exfoliaient en petites pellicules lamelleuses : elle était poitrinaire.

Comme j’avais l’âge d’entrer au collège, mes parents me firent revenir à la ville, d’autant plus qu’ils avaient appris la mort de mon oncle, qui avait fait une chute de cheval dans un chemin difficile, et s’était fendu la tête.

Un testament trouvé dans sa poche instituait Berthe et Pragmater ses uniques héritiers, à l’exception de sa bibliothèque, qui devait me revenir, et d’une bague en diamants de sa mère, destinée à Maria.

Mes adieux à Maria furent des plus tristes ; nous sentions que nous ne nous reverrions plus. Elle m’embrassa sur le seuil de la porte, et me dit à l’oreille :

— C’est ce vilain Pragmater qui est cause de tout ; il a voulu tuer le grillon. Nous nous reverrons chez le bon Dieu. Voilà une petite croix en perles de couleur que j’ai faite pour toi ; garde-la toujours.

Un mois après, Maria s’éteignit. Le grillon ne chanta plus à dater de ce jour-là : l’âme de la mai-