Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/99

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les corrupteurs du goût, les novateurs rétrogrades (Daniel Jovard florissait en 1828), les Welches, les Vandales, les Goths, Ostrogoths, Visigoths, etc., qui voulaient nous ramener à la barbarie, à la féodalité, et changer la langue des grands maîtres pour un jargon hybride et inintelligible ; il faisait encore bien plus beau voir la mine ébahie de son père et de sa mère, du voisin et de la voisine.

Cet excellent Daniel Jovard ! il aurait plutôt nié l’existence de Montmartre que celle du Parnasse ; il aurait plutôt nié la virginité de sa petite cousine dont, suivant l’usage, il était fort épris, que la virginité d’une seule des neuf Muses. Bon jeune homme ! je ne sais pas à quoi il ne croyait pas, tout esprit fort qu’il était. Il est vrai qu’il ne croyait pas en Dieu mais, en revanche, il croyait à Jupiter, en M. Arnault et en M. Baour mêmement ; il croyait au quatrain du marquis de Saint-Aulaire, à la jeunesse des ingénuités du théâtre, aux conversions de M. Jay, il croyait jusqu’aux promesses des arracheurs de dents et des porte-couronnes.

Il était impossible d’être plus fossile et antédiluvien qu’il ne l’était. S’il avait fait un livre, et qu’il lui eût accolé une préface, il aurait demandé pardon à genoux au public de la liberté grande, il eût dit ces faibles essais, ces vagues esquisses, ces timides préludes ; car, outre les croyances que nous venons de mentionner, il croyait encore au public et à la postérité.

Pour terminer cette longue analyse psychologique