Page:Gautier - Richard Wagner et son œuvre poétique, 1882.djvu/194

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
parsifal

remplir sa sainte fonction. Le Graal reste depuis longtemps enfermé dans sa châsse et son gardien contrit, qui ne saurait mourir s’il le contemple, espère ainsi forcer sa fin et terminer avec sa vie son tourment. La sainte nourriture nous est refusée ; aussi notre force héroïque dépérit. Jamais plus ne nous arrive ni un message ni un appel lointain à de saints combats. La chevalerie, privée de courage et de chef, erre pâle et misérable. Ici dans ce coin de forêt, je me suis caché solitaire, attendant tranquillement la mort à laquelle mon vieux seigneur d’armes, Titurel, est échu déjà, car le saint héros n’étant plus réconforté par la vue du Graal mourut, un homme comme tous.

— Et c’est moi, moi qui causai toute cette misère ! s’écrie Parsifal, avec un sursaut de douleur. Ah ! quelle coulpe, quelle masse de méfaits doivent depuis l’éternité peser sur cette tête de fou, puisque devant moi, élu pour la rédemption, je vois s évanouir, après avoir erré éperdument, le dernier sentier du salut.