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des angoisses indicibles. Où es-tu ? Armande. Reviens-moi, reviens-moi. Toi seule peut me faire vivre ; sans toi, je meurs à tout moment.

— Je viens, ma mère ; vois, je suis là à tes pieds ; et l’enfant s’approcha jusque dans les bras d’Alexandrine.

George avait la pâleur d’un cadavre. Tout est sans espoir ; mon Dieu ! j’espère pourtant encore en vous. Il faut qu’elle revienne, au prix d’un miracle s’il le faut. L’espérance et la foi peuvent tout.

La mère venait de prendre une main de l’enfant. Ta main est brûlée petite, et ton visage aussi ; mais ta main est douce et son attouchement me fait du bien.

— Oui, ma mère, le sang qui coule là, dans ces veines toutes petites, vois-tu ? c’est le tien.

— Tes yeux sont bleus ?

— Oui, comme les tiens, mère. Si mon visage est moins blanc, c’est que la fumée l’a bruni, chez les sauvages.

— Les sauvages !… les sauvages !… ceux qui sont venus te prendre ; ils vont venir, mon Armande, mon enfant, mon trésor !…

Ce ne fut que cris et larmes, sanglots et paroles entrecoupées. Ce que l’art n’avait pu accomplir, la voix du sang venait de le faire.

— Enfant, s’écria la mère, ma raison est vaincue facilement, car les ténèbres y remplaçaient la lumière depuis longtemps. Le sang qui coule dans tes veines a fait un prodige ; il a réchauffé le mien que ton départ avait figé dans mes artères. Viens maintenant que je vive de toi, de ta vie, de ton regard, viens sur mon cœur ; et un torrent de larmes vint inonder Armande qui avait des pleurs au bord de ses longs cils.

Alexandrine semblait trouver la vie dans ces longs embrassements, dans cette étroite union avec l’enfant