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IV

UN CHOIX.


Enfin, la calèche patriarcale, traînée par un superbe étalon canadien, fait son entrée au village. Il y a bien des têtes aux fenêtres ; ils reçoivent maints saluts de bonnets de coton et de laine, ces bonnets devenus si rares et qui vont si bien au cultivateur Canadien. Quelle joie de partout. L’église est là toute jeune, toute éblouissante sous les rayons du soleil qui va se plongeant tout entier dans une fournaise ardente, de l’autre côté des Laurentides ; le fleuve est calme et sillonné ci et là de quelques canots indiens chassant le marsouin et la pourcie ; les oiseaux ont des voix plus ravissantes encore ; les insectes ont un bourdonnement joyeux ; l’air a des parfums de salin qui fortifient les poumons des jeunes gens accoutumée à l’air plus ou moins vicié de nos collèges.

George et Mélas ne sont pas insensibles à ces harmonies de la nature, aux charmes de ces concerts éternels dont l’homme a le plus grand rôle. Ils sont à peine débarqués que deux bras nerveux enlacent leur cou dans une étreinte passionnée, une étreinte de mère, et l’air retentit des baisers sonores qu’on échange. Tout est mis de côté : le ménage, le train, le soin des animaux, etc. Rien ne les occupe : on est tout entier à ces chers enfants qui arrivent au milieu d’eux, pour y rester toujours ; au moins ils ne doivent pas retourner au Séminaire.

Les pauvres mères ! la joie du retour se lit dans leurs grands yeux. Cette grande et excitante nou-