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chapitre xi

tisme, qu’il s’unit au Père Annat d’abord, sauf à l’abandonner en 1668, et au Père La Chaise ensuite. Il agit toujours avec une désinvolture de très grand seigneur et il sut être le plus poli et le plus aimable des persécuteurs.

Un plan d’attaque fut dressé ; il fut décidé que l’on ne contreviendrait pas à la paix de Clément IX et que l’on ne chercherait même pas à peser sur la cour de Rome pour obtenir des constitutions. C’était une affaire de pure politique et non de religion, l’hypocrisie n’était donc plus nécessaire. On pouvait reléguer à l’arrière-plan Saint Augustin, Molina et Jansénius. Port-Royal ne serait plus considéré comme un nid, comme un repaire d’hérétiques, mais comme un foyer d’agitation frondeuse. On agirait contre lui comme Mazarin avait agi contre la célèbre Compagnie du Saint-Sacrement ; le roi serait requis d’intervenir en personne, car on savait qu’il n’hésiterait jamais à mettre son absolutisme au service des jésuites.

Mais les grands politiques savent prendre leur temps : « Le temps et moi », disait Mazarin. Harlay et La Chaise ne se pressèrent donc pas de fondre sur Port-Royal, parce que Port-Royal avait des amis et des protecteurs jusque dans la famille royale, et parmi eux l’intrépide duchesse de Longueville, le prince de Condé dans une certaine mesure, le prince et la princesse de Conti ; peut-être même le duc d’Orléans et la grande Mademoiselle ; c’est pour cela qu’on attendit patiemment jusqu’en 1679, jusqu’à la mort de Mme de Longueville.

Anne-Geneviève de Bourbon mourut en effet, à l’âge de cinquante-neuf ans, le 15 avril 1679, quinze mois après Mme de Sablé, et Port-Royal perdit en elle la plus dévouée de ses protectrices, disons plus, sa grande et