Page:Gazier - Histoire générale du mouvement janséniste, depuis ses origines jusqu’à nos jours, tome 1.djvu/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
20
histoire du mouvement janséniste

unique sauvegarde. On sait quelle était la nature de ses sentiments pour le saint monastère. Convertie sincèrement en 1653, elle se mit en 1660 sous la direction de Singlin, parce qu’elle voulait expier par une rude pénitence une vie d’aventures, de désordres et d’intrigues. Elle se tourna donc du côté des personnes qui pratiquaient la pénitence austère, les Carmélites du faubourg Saint-Jacques et leurs voisines les religieuses de Port-Royal. Les Carmélites n’avaient pas besoin d’être protégées ; elle se contenta de venir en 1672 loger auprès d’elles et même chez elles, dans leur cour du dehors ; elle alla prier dans leur église, elle y vit durant cinq ans Mlle de La Vallière, et c’est là qu’elle mourut, dans un petit hôtel qui subsiste encore ; sa chambre mortuaire sert aujourd’hui d’atelier à des jeunes filles, élèves d’une école d’éducation artistique. Quant aux religieuses de Port-Royal, Mme de Longueville avait pour elles une estime et une amitié non moins vives, et elle prit leur défense avec un dévouement admirable. Elle s’entremit pour elles sans craindre de se commettre et de se compromettre ; elle cacha Arnauld et Nicole dans son hôtel, à deux pas du Louvre, et elle prit une très grande part à la paix de Clément IX. Ensuite elle se fit construire à Port-Royal des Champs un vaste hôtel, et c’est dans l’église de Port-Royal qu’elle se serait fait enterrer si elle n’était pas morte à Paris. Du moins son cœur y fut déposé avant de revenir après 1711 à Saint-Jacques du Haut-Pas, où il doit être encore, non loin de la tombe de Saint-Cyran.

Mme de Longueville ne pouvait pas prévoir que son jeune frère le prince de Conti reposerait deux cents ans plus tard au milieu des ruines de son cher Port-Royal des Champs ; il y est pourtant depuis 1905, et c’est