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avant-propos

roissiens modèles, et le clergé qui les anathématise se plaint parfois de n’en pas trouver davantage à la grand’messe, au prône et à vêpres. Enfants soumis de l’Église, s’ils ont fini par accepter l’épithète que leurs ennemis leur jetaient à la face comme une injure, c’est de guerre lasse, ou, si l’on veut pour ne pas abandonner lâchement un saint évêque qu’ils savent avoir été indignement calomnié. En réalité ils remontent beaucoup plus haut que Jansénius, que saint Thomas et que saint Bernard ; ils se réclament de saint Augustin dont la doctrine, disent-ils, a toujours été « canonisée » par l’Église. Si donc on voulait faire un récit des querelles issues de l’Augustinus de l’évêque d’Ypres, il faudrait intituler le livre : Histoire de l’augustinisme dans les temps modernes.

Mais s’il n’y a jamais eu de jansénistes véritables, on ne saurait nier qu’il s’est rencontré au sein du catholicisme, surtout depuis le XVIe siècle, des philosophes, des historiens, des moralistes et des théologiens qui se distinguaient par un tour d’esprit particulier. Il s’est trouvé des hommes, soit isolés, soit réunis en groupes plus ou moins nombreux, qui entendaient ne pas suivre en aveugles le grand courant des idées religieuses modernes ; il y a eu, il y a peut-être encore un état d’âme que l’on peut appeler janséniste, port-royaliste ou même pascalien. Il est des hommes qui, en raison de l’éducation qu’ils ont reçue dès l’enfance, ou par suite des études auxquelles ils se sont livrés spontanément, ont une façon particulière de concevoir la théologie dogmatique, la morale chrétienne et l’histoire religieuse ; ils mettent à la base de leur catholicisme l’obéissance raisonnable que recommandait l’apôtre saint Paul. Adversaires déclarés du protestantisme sous toutes ses formes, ennemis de ce qu’on appelle aujourd’hui le modernisme, ils ne sont pas moins ennemis du néocatholicisme exclusivement romain et des doctrines évolutionnistes en matière de dogmes. Ils n’admettent pas,