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avant-propos

comme disait un prêtre très distingué, que l’on soit toujours pendu à la sonnette du Vatican, et jamais il ne leur viendrait à l’esprit de dire, comme autrefois Brunetière : « Je crois en bloc, sans entrer dans le détail, tout ce que Rome veut que je croie. » Persuadés que le christianisme est une œuvre divine, parfaite dès l’origine, et que par conséquent il ne peut pas être soumis à la loi du progrès comme les institutions humaines, ils se tiennent en garde contre tout ce qui peut avoir un air de nouveauté. Ils sont disciples de saint Paul, de Tertullien, de saint Vincent de Lérins, et ils souscrivent sans hésiter à cette déclaration de Bossuet : « L’Église ne varie jamais ; et au contraire l’hérésie, qui a commencé par innover, innove toujours. » Et comme les Jésuites sont à leurs yeux les novateurs par excellence, ils combattent le jésuitisme, le molinisme, le laxisme et tous leurs dérivés partout où ils croient les rencontrer. C’est en cela que consiste leur jansénisme, si bien que le cardinal Bona a pu définir les jansénistes de la manière suivante : « des catholiques fervents qui n’aiment pas les Jésuites ». On pourrait dire que le jansénisme est la forme française de l’opposition des catholiques aux Jésuites. À ce compte il y a toujours eu depuis le XVIe siècle des jansénistes, même dans le haut clergé, même sous la pourpre cardinalice, voire sous la tiare d’Innocent XI et de Benoît XIV.

Ainsi s’explique le grand courant de sympathie qui amène chaque année à Port-Royal des Champs des milliers de visiteurs ; qui fait lire le bel ouvrage de M. André Hallays, qui rend éternellement jeune le Port-Royal de Sainte-Beuve, cet admirable historien que la curiosité seule avait attiré de ce côté, et qui s’est trouvé entraîné, grâce à sa merveilleuse intelligence, beaucoup plus loin que ne l’aurait souhaité son incurable scepticisme. Le Port-Royal de Sainte-Beuve est à revoir, à corriger et à compléter, il n’est pas à refaire. Il sera toujours un excellent guide, d’autant