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tre eux la préséance. Chacun voulait être le ministre de la divinité tutélaire de son pays, et supposait qu’elle-même avait pris parti dans ses différends. En conséquence, on dit que Neptune avait cherché à enlever l’Égialée à Junon, mais qu’il succomba. Argos, la principale ville de cette contrée, s’étant mis sous la protection de la déesse, on supposa qu’il s’en était vengé en inondant la campagne de cette ville, parce qu’à peu près dans ce même temps l’élévation de la mer fit déborder le fleuve Inachus. Il fut alors résolu de prendre des arbitres qui condamnèrent les partisans de Neptune.

Ceux-ci furent encore moins heureux dans l’Attique, où l’on se porta contre eux à de violentes extrémités. Halirrhotus, fils ou prêtre de ce Dieu, fut tué par Mars, c’est-à-dire par quelque zélateur du culte de cette divinité scythe. Le meurtrier eut assez de crédit pour se faire absoudre, après être sorti de la prison où Otus et Éphialte, qui avaient pour mère une prêtresse de Neptune, l’avaient jeté et gardé secrettement pendant treize mois. Il y aurait même péri, si la belle Érybée, leur marâtre, n’en avait averti quelqu’un de ses proches qu’on imagine être Mercure, à cause de l’emploi de celui-ci sur l’Olympe. Le jugement de ce meurtre devint célèbre et l’époque en a été fixée à l’an 1532 avant Jésus-Christ, sous le règne de Crancus. Il fournit l’idée du tribunal de l’Aréopage, qui prenait connaissance de toutes les innovations en matière de religion.

Elles ne cessèrent à Athènes qu’à l’arrivée des colonies égyptiennes, qui vinrent de Saïs en apportant les cérémonies d’Isis ou Neith, l’Athénée des Grecs, et la Minerve des Romains. Alors Neptune perdit entièrement sa prééminence ; ce qui donna lieu à la fable de son différend avec cette déesse au sujet de la possession de l’Attique. Ce n’est pas le seul de ce genre que recèle l’ancienne mythologie ; mais l’énumération en serait trop longue et demanderait des explications trop étendues, qui feraient perdre de vue l’objet principal de cet ouvrage.

On ne peut guère douter que les premières étincelles des guerres de religion ne soient sorties de Dodone, le plus ancien foyer de la superstition des Grecs. Les prêtres de ce lieu célèbre étaient trop grossiers pour ne pas être fanatiques. Les uns s’appelaient Tomares, d’une montagne de ce nom qu’ils habitaient ; les autres Selles ou Helles, d’une rivière qui traversait la plaine de Thesprotie, où ils avaient établi leur séjour, près du fameux oracle dont ils étaient les interprètes. Couchés sur la terre, les pieds couverts d’ordures, et ne vivant que de glands, ils étaient aussi misérables que les devins des sauvages de l’Amérique. Cela ne les empêchait pas d’avoir un grand crédit sur l’esprit des hordes pélasgiques qui les entouraient. Des chaudières suspendues en