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naturels proprement dits[1], et c’est par le plus bizarre des contre-sens que les modernes ont appelé ciments romains, dans le langage courant, précisément une matière que les Romains n’ont jamais utilisée dans la construction. Cette bizarrerie s’explique par ce fait que lorsque l’usage des ciments de Vassy ou de Portland se répandit, on assimila naturellement et justement la dureté des mortiers qu’ils formaient à celle des mortiers romains de pouzzolane ou de tuileaux. Quant, au mot lui-même, ciment, qui provient de caementam[2], moellon, il s’explique aussi par ce fait que les constructions romaines consistent, en moellons noyés dans du mortier, lequel est souvent du mortier de tuileaux, du ciment. On a désigné à la longue le tout par une des parties, puis l’autre partie par le tout ainsi appelé, ce qui a donné le contre-sens.

La pouzzolane, au contraire, est d’usage romain. « Est etiam genus pulveris quod efficit naturaliter res adinira.ndas. Nasciliir in regionibus Baïanis et in agris miinicipiorum quae sunt circa Vesiwium montem. Quod commixlum cam calce et caemento non


    généralement, dans toutes les régions volcaniques, tantôt naturellement pulvérulente, tantôt en blocs faciles à réduire en poudre. Telle est la pouzzolane ou trass d’Andernach, aux bords du Rhin.
    Les pouzzolanes sont essentiellement, composées d’argile combinée avec un peu de chaux, de potasse, de soude, de magnésie et d’oxydes de fer. Elles contiennent de 70 à 90 parties d’argile, et le surplus en chaux, avec 1 ou 2 % des quelques éléments qui viennent d’être énumérés. Il est rare qu’elles puissent être employées seules, car elles forment difficilement pâte avec l’eau. On les utilise à l’état de mortier en les mélangeant avec une certaine proportion de chaux grasse.
    On fabrique des pouzzolanes artificielles avec des pierres calcaires qui renferment moins de 40 % de carbonate de chaux et dont la calcination fournit un produit composé de 70 à 90 parties d’argile avec 30 à 10 parties de chaux. Ce produit, mélangé avec de la chaux grasse, donne, comme la pouzzolane naturelle, un mortier hydraulique qui durcit rapidement sous l’eau. On peut aussi en fabriquer avec des scories de forge.
    Mais il est un ciment artificiel très anciennement connu, usité bien avant les ciments naturels et sans doute avant la pouzzolane ; c’est celui qu’on appelle le ciment ordinaire, ou ciment de tuileaux, et qui est plutôt une sorte de pouzzolane artificielle qu’un ciment proprement dit. On l’obtient en pulvérisant et en tamisant de l’argile cuite. c’est-à-dire des débris de tuiles, briques et poteries. Cette poudre, qui ne contient jamais plus de 10 % de chaux, ne peut, bien entendu, être employée seule ; mais si on la mélange avec de la chaux grasse, elle donne un mortier assez hydraulique et qui acquiert à la longue une grande dureté.

  1. D’où, vient qu’on n’ait pas utilisé des matières si avantageuses ? On pourrait dire que les opérations diverses qu’elles exigent, calcination très soignée, extinction en paniers pour la chaux hydraulique, gâchage pour les ciments, blutage, conservation envases clos, sont des opérations bien plus délicates que celles qui suffisent pour la chaux grasse. Mais, sans donner tant de raisons, ne sait-on pas comment naissent si souvent les industries ? Pourquoi aussi n’exploitait-on pas davantage la houille, que cependant l’on connaissait bien ? Il en est de même d’une quantité de découvertes : à l’usage elles paraissent si simples qu’on est étonné de n’y avoir pas songé plus tôt.
  2. Le radical de caementum est, probablement, caed (coudre, tailler, couper), caedmentum.