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plus solide fondement d’une organisation pacifique, et ces collèges devinrent très vite nombreux et florissants. Un moment troublée par la réaction guerrière qui suivit cette période, l’institution fut remise en vigueur par la nécessité où se trouvèrent les citoyens romains, environnés d’ennemis, de s’adonner de concert au perfectionnement de leurs armes et de leur équipement, militaire, et aussi de se suffire à eux-mêmes pour tous les besoins de la vie. Cependant, une fois victorieux et maîtres de l’Italie, enrichis, pourvus d’esclaves, les Romains, tout comme les Athéniens après la grande époque d’activité patriotique, abandonnèrent autant que possible aux esclaves la peine du travail manuel. Mais tous n’étant pas assez riches pour en avoir, le fossé fut de ce fait creusé plus profond entre les classes sociales. Tandis que, placés entre les patriciens et la plèbe, les chevaliers s’enrichissaient par le trafic, le menu peuple, en face de la concurrence du travail servile, dut lutter âprement pour vivre, suscitant par son existence besogneuse, quelquefois sordide, l’orgueilleux dédain, non seulement des riches oisifs, mais des meilleurs hommes d’Etat. C’est Cicéron lui-même qui dans le De Officiis, assimile à un vil esclave le simple artisan: « Opifices omnes sordida arte versantur : nec enim quidquam ingenuum habere potest officina[1]. »

Cependant, faibles et misérables isolément, ces artisans, groupés en collèges, devenaient une force vivace, avec laquelle l’Etat devait compter. Entre les membres de chaque collège régnait, une union étroite, fondée sur la communauté des occupations, des habitudes et surtout du culte et des habitudes religieuses. Solidaires aussi entre elles par la similitude des intérêts, ces corporations exerçaient dans les comices une vigoureuse influence, adroitement entretenue ou prudemment ménagée par les tribuns, souvent redoutable aux patriciens. Leur importance politique avait été consacrée, vers le milieu du iiie siècle avant Jésus-Christ, par leur répartition en deux centuries, qui, selon Tite-Live, votaient dans les comices avec la première classe des citoyens romains : privilège évident, puisque les centuries de la première classe votaient les premières. Malgré les prohibitions dont elles furent souvent l’objet de la part des grands, les corporations. se maintinrent :

  1. De Officiis, {{|sc|i}}, 42.