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est pas moins digne à nos yeux d’une réelle sympathie. Il y a lieu d’être surpris du mélange de niaiserie et de très ferme bon sens qui se rencontre dans ce caractère d’empereur[1]. Ses actes d’excellente politique et de sage administration étant nombreux et d’une authenticité indiscutable, on serait porté à croire à beaucoup d’exagération dans les traits d’imbécillité que l’histoire lui prête. C’était sans doute un de ces hommes d’esprit lent, susceptibles de réflexion excellente, mais sujets à des absences dépensée, souvent interdits, gauches et bégayants, quelquefois au contraire sottement hardis, capables pourtant, dans des circonstances importantes, de s’exprimer convenablement devant une assemblée.

C’est ainsi que son discours en faveur des nobles Gaulois déjà citoyens romains, et auxquels il s’agissait d’accorder ou de refuser l’accès au sénat et à toutes les dignités romaines, sut faire valoir de justes et sages raisons[2], qui, présentées par l’empereur lui-même, devaient triompher des dispositions des sénateurs, peu favorables au projet. On a retrouvé à Lyon, en 1528, une partie considérable de ce discours, gravé sur une table de bronze qui est encore une des pièces les plus précieuses du musée de la ville[3]. Il est d’une éloquence bien molle et bien diffuse, mais il respire une sympathie sincère à l’égard des Gaulois, et méritait bien que l’assemblée du confluent témoignât sa gratitude en le faisant graver sur le bronze et afficher sur l’un des édifices qui avoisinaient l’autel fédéral. Quant aux Lyonnais eux-mêmes, ils n’étaient pas directement intéressés à la mesure nouvelle, puisque dès la fondation de leur colonie, ils possédaient le plein droit de cité[4] : comme Claude le constatait au cours de son argumentation, il y avait déjà des Lyonnais au sénat.

Ils avaient néanmoins des raisons toutes spéciales de reconnaissance à l’égard de Claude. En l’an 43, quelques années avant le discours au Sénat, qui est de l’an 48, l’empereur avait traversé la Gaule pour tenter une expédition en Bretagne, qui fut rapide et couronnée de succès. Il passa deux fois par Lyon, à l’aller et au

  1. Suétone, Claude, 3, 15.
  2. Tacite (Annales xi, 24) reproduit le discours de Claude, en observant son sens général, mais sans scrupuleuse fidélité, d’ailleurs éloquemment.
  3. V. Allmer et Dissard (ouv. cité) I, p. 58, et P. Fabia, Revue d’Histoire de Lyon, t. VII, 1908, Claude et Lyon, p. 15, ssq.
  4. V. Mommsen, Hist. romaine, trad. Cagnat et Toutain, ix, p. 111.