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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/146

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plus noble de leur pouvoir, la reconnaissance d’une nation qu’ils avaient arrachée à l’hérésie et à la tyrannie des empereurs grecs. Il paraît que dans un siècle de superstition, la puissance royale et l’autorité sacerdotale réunies durent se fortifier l’une l’autre, et que les clefs du paradis étaient pour l’évêque de Rome le garant le plus sûr de l’obéissance qu’il voulait obtenir sur la terre. Les vices personnels de l’homme pouvaient, il est vrai, affaiblir le caractère sacré du vicaire de Jésus-Christ ; [Sur leurs vertus.]mais les scandales du dixième siècle furent effacés par les vertus austères et plus dangereuses de Grégoire VII et de ses successeurs ; et dans les combats d’ambition qu’ils soutinrent pour les droits de l’Église, leurs revers et leurs succès augmentèrent également la vénération du peuple. Victimes de la persécution, on les voyait quelquefois errer dans la pauvreté et dans l’exil ; le zèle apostolique avec lequel ils s’offraient au martyre, devait émouvoir et intéresser en leur faveur tous les catholiques. Quelquefois tonnant du haut du Vatican, ils créaient, jugeaient, déposaient les rois de la terre, et le plus orgueilleux des Romains ne pouvait se croire avili en se soumettant à un prêtre qui voyait les successeurs de Charlemagne lui baiser les pieds et lui tenir l’étrier[1]. L’intérêt même tem-

  1. Voyez Ducange : Gloss. Mediæ et infimæ latinitalis, t. VI, p. 364, 365, Staffa. Les rois rendaient cet hommage aux archevêques, et les vassaux le rendaient à leurs seigneurs (Schmidt, t. III, pag. 262) ; c’était un des plus adroits moyens de politique de la cour de Rome que de