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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/80

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la force de se satisfaire, les Goths chrétiens ne se conduisirent pas tous selon les préceptes de l’Évangile. Les écrivains les plus disposés à exagérer leur clémence, avouent qu’un grand nombre de Romains furent massacrés[1] et que les rues étaient remplies de cadavres que la consternation générale laissait sans sépulture. Le désespoir des citoyens se changeait quelquefois en fureur ; et lorsque les Barbares éprouvaient la moindre résistance, le châtiment s’étendait jusque sur le faible et sur l’innocent désarmé. Quarante mille esclaves exercèrent, sans pitié et sans remords, leur vengeance personnelle ; et les traitemens ignominieux qu’ils avaient reçus furent expiés par le sang des familles les plus coupables ou les plus accusées de cruauté envers eux. Les matrones et les vierges de Rome essuyèrent des insultes plus affreuses pour la chasteté que la mort même ; et l’historien ecclésiastique nous a conservé d’une d’entre elles un exemple de vertu qu’il offre à

  1. S. Jérôme, t. I, p. 121, ad Principiam. Il applique au sac de Rome les expressions énergiques de Virgile :

    Quis cladem illius noctis, quis funera fando,
    Explicet,
    etc.

    Procope (l. I, c. 2) affirme que les Goths massacrèrent un grand nombre de Romains. Saint Augustin (De Civit. Dei, l. I, c. 12, 13) offre aux chrétiens des motifs de consolation pour la mort de ceux dont les cadavres, multa corpora, restèrent sans sépulture, in tantâ strage. Baronius a tiré des écrits des différens Pères de l’Église quelques lumières sur le pillage de Rome. Annal. ecclés., A. D. 410, nos 16-44.