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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/125

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les évêques faisaient retentir dix-huit cents chaires des préceptes d’une soumission passive à l’autorité d’un souverain orthodoxe et légitime ; leurs fréquentes assemblées et leur continuelle correspondance maintenaient l’union des Églises éloignées, et l’alliance spirituelle des catholiques soutenait l’influence bienfaisante de l’Évangile, qu’elle resserrait à la vérité dans d’étroites limites. Un siècle servile et efféminé adopta facilement la sainte indolence de la vie monastique ; mais si la superstition n’eût pas ouvert cet asile, les lâches Romains auraient déserté l’étendard de la république par des motifs plus condamnables. On obéit sans peine à des préceptes religieux qui encouragent et sanctifient l’inclination des prosélytes ; mais on peut suivre et admirer la véritable influence du christianisme dans les effets salutaires, quoique imparfaits, qu’il produisit sur les Barbares du Nord. Si la conversion de Constantin précipita la décadence de l’empire, sa religion victorieuse rompit du moins la violence de la chute en adoucissant la férocité des conquérans.

Cette effrayante révolution peut s’appliquer utilement à l’instruction de notre siècle : un patriote doit sans doute préférer et chercher exclusivement l’intérêt et la gloire de son pays natal ; mais il est permis à un philosophe d’étendre ses vues, et de considérer l’Europe entière comme une grande république, dont tous les habitans ont atteint à peu près au même degré de culture et de perfection. La prépondérance continuera de passer successivement