Page:Gide - Les Nourritures terrestres.djvu/181

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lainages, les femmes de haïks rayés, attendaient que l’humidité les pénétrât. Ils restaient comme avant sur les bancs, mais toutes les voix s’étaient tues, et chacun écoutait les gouttes de l’averse, laissant l’eau, passagère au milieu de l’été, alourdir les étoffes et laver les chairs proposées. — La moiteur de l’air, l’importance des feuilles étaient telles que je restais assis sur ce banc auprès d’eux, sans résistance pour l’amour. — Et quand, la pluie passée, les branches seules ruisselèrent, alors chacun ôtant ses souliers, ses sandales, palpa de ses pieds nus cette terre mouillée, dont la mollesse était délicieuse.

*


Entrer dans un jardin où ne se promène personne ; deux enfants vêtus de laine blanche m’y conduisent. Jardin très long au fond duquel une porte s’ouvre. Arbres plus grands ; le ciel plus bas s’accroche aux arbres. — Les murs. — Villages entiers sous la pluie. — Et, là-bas, les montagnes ; ruisseaux en formation ; nourriture des arbres ; fécondation grave et pâmée ; arômes voyageurs.