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FLORENCE

minutes, et le jeune gommeux ne vient pas. Hubert serre les poings avec colère.

— Le lâche aurait-il peur de se battre, ou en est-il encore à friser les soyeuses mèches de sa chevelure et à cirer les extrémités poilues de sa moustache ?

Enfin, après quinze minutes de retard, ils font leur apparition sur le terrain. Pâle, Gustave Turcobal était aussi pâle que les bandages du docteur qui semblaient l’attendre au pied de l’arbre.

Le duel n’est plus de nos mœurs. Nous avons aujourd’hui une façon plus sommaire de régler nos différends. L’histoire du Canada, cependant, en compte quelques-uns, çà et là. Qu’il suffise de dire que le sang français coule dans nos veines, fait battre nos cœurs, et l’on aura peine à comprendre que le duel soit biffé du dictionnaire canadien.

Les témoins examinent les pistolets. Les deux adversaires se rendent à leurs postes, à une distance de vingt pas. Le second de Turcobal esquisse une grimace qui remémore quelque bonze au ventre à triple ballot d’une pagode du Bouddha. Sur le front de Gustave, la sueur ruisselle. Un courage calme et froid jaillit des yeux d’Hubert. Les bras s’étendent. On compte, un, deux…

Mais soudain un cri terrible, un seul, se fait entendre. Une jeune fille accourt et se jette sur le bras d’Hubert qu’elle essaie de désarmer.

— Non, Hubert, Hubert, tu ne te battras pas ! Je t’en supplie, je t’en conjure. Songe à ta famille, songe à toi. M. Turcobal, pensez à votre mère qui vous aime et qui succomberait sous le poids de la douleur si vous veniez à être tué. Oh ! mon cher Hubert, ne