Page:Giraudoux - Adorable Clio.djvu/114

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Déjà les vieux messieurs, qui savent que j’ai à cœur de les saluer le premier, tentent maintenant à dix pas, à quinze pas, de me prévenir. M. Knœpfl, de son visage simplifié par le froid, ne peut me faire à chaque rencontre, malgré ses efforts, avec les trois traits qui lui restent, que le même sourire. C’est le maire. C’est lui qui veille à ce que les mots français soient pris ce matin dans leur vrai sens. Il a fait préparer le parc des autos dans un vrai parc, le château d’eau dans le palais. La haie des fillettes, le long du trottoir, est doublée d’une vraie haie de sapins et de ronces ; et tout, dans la ville, l’a compris et l’imite, et les yeux d’enfants sont de vrais yeux, aspirent la bonté, la santé ; et le chien du quartier est un vrai chien ; et les échos de la montagne sont de vrais échos, sont des oiseaux, sont des taches de soleil…

Le vent souffle. Alors les drapeaux et les têtes des femmes s’inclinent d’un coup vers les Vosges. Il ne souffle plus, tout se tait ;