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260 LE MOUVEMENT LITTÉRAIRE

rebelle éternellement aux conseils les plus tendres, les plus persuasifs de l'expérience. Vieille histoire toujours nouvelle, toujours palpitante et douloureuse de la jeu- nesse enivrée, amoureuse, qui court à son rêve sans vouloir entendre Tappel désespéré de la mère qui a formé les mêmes rêves et qui connaît — hélas ! — les lendemains douloureux.

C'est la course du flambeau, ses éternels et tragiques recommencements; et c'est l'histoire de la candide et ravissante Didy, bienheureuse fillette de Diane Le Paruel, mère inventive et patiente, mère douloureuse qui, de toutes les forces d'une farouche et tendre vo- lonté, défend sa petite contre l'aventure qui Ta meur- trie, avilie et vieillie avant l'âge. Elle se flatte d'avoir réussi, et la tendre Didy, à seize ans, ne connaît que sa petite maman. Mais, certain soir, apparaît, au détour d'un chemin, Gennaro, un bel adolescent aux yeux noirs et brillants, et toutes les puériles forteresses de la mère s'écroulent comme un château de cartes, et voici la petite Didy transformée, frénétique. « Le bonheur, ce n'est plus sa maison, son jardin, sa mère admirable, son délicieux petit passé; c'est un garçon qu'elle n'a vu qu'une fois et dont elle ne sait rien. La voici ivre d'insoumission et d'oubli, la voici fatale, aimantée, la voici devenue l'Instinct. »

Et c'est alors, avec la précision fatale, un peu pué- rile d'un conte de fées, l'histoire de la « vieille Diane » que revit la petite Diane. Histoire tellement identique que Diane devient, après ses premiers rêves, l'amie infidèle du même homme dont sa mère fut jadis l'infi- dèle amie; elle connaît les mêmes ivresses, les mêmes tourments, subit les mêmes déchéances, et, après avoir parcouru un calvaire tout pareil, elle met au monde, certain matin, une petite fille qu'elle regarde en s'écriant, avec une candide certitude : « Va, je saurai te défendre, moi ! » Car, « après tant de candeur détruite par l'existence^ elle garde encore celle de croire qu'elle