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DÉCEMBRE. — LES ROMANS 387

lement Taveu. Une épreuve s'impose : cette vie de plaisir et de liberté qu'il n'a jamais connue, il faut qu'il en fasse l'expérience et, paisiblement, il offre à Jeanne de se séparer d'elle, séparation temporaire, car il lui fixe pour dans un an, un rendez-vous à une date précise, à Moulins, où ils ont commencé de connaître le bonheur.

Jeanne accepte, donne sa parole, et, à la date fixée, François se trouve fidèle au rendez-vous. Il a dans cette année épuisé toutes les joies de la liberté, il pense à peine à sa déception, tant sa joie est grande de repren- dre auprès de la seule femme qu'il aime, auprès de sa femme, la route interrompue.

Mais Jeanne n'est pas au rendez-vous; seule, une lettre est là, très douce, très raisonnable, qui lui apprend que, pendant cette année d'épreuve, elle a refait sa vie définitivement; elle est très loin, à Buenos- Aires, aux côtés d'un honnête homme qui l'aime et dont bientôt elle va avoir un enfant. « Notre aventure était fatale, lui dit-elle, tu m'avais épousée trop jeune, tout a découlé de là. Puisque vous autres hommes vous êtes ainsi faits, puisqu'il faut que vous l'émoussiez, cet instinct, ce désir à cent faces, que la nature a mis en vous, épuisez donc votre fougue, soyez fervents et volages avant de vous être unis à la femme qui, elle, se confie toute à vous ».

Cette thèse, qui n'est pas nouvelle, M. Marcel Ber- ger l'a développée en un roman tout à fait remarquable, vivant, humain, d'une observation minutieuse, un peu trop parfois, quand elle retarde par des descriptions la marche d'une action à laquelle l'auteur a su nous pas- sionner.