Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/114

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» L’aventure de ce pauvre garçon est fort longue, et je ne vous ennuierai pas de ce récit dans ce moment-ci. Tout ce que je puis vous dire, c’est qu’il en résulte, plus clair que le jour, que, pour avoir voulu porter peut-être un œil trop curieux sur les affaires personnelles de son maître, et pour avoir obtenu de lui en confidence, comme je le soupçonne, quelque secret important, ce maître a conçu une antipathie furieuse contre lui. Cette antipathie s’est augmentée successivement jusqu’au point d’induire cet homme à forger contre celui-ci cette infâme accusation. Il paraît déterminé à faire pendre ce jeune homme, sans la moindre pitié, plutôt que de le laisser s’en aller où il voudra, ou même de souffrir qu’il soit hors de son pouvoir. Williams m’a exposé le fait avec tant de candeur, que je le maintiens aussi innocent que moi-même du crime dont on l’accuse. Néanmoins les domestiques de l’accusateur, qui ont été appelés pour assister à l’information, et un parent de ce même accusateur, qui, en qualité de juge de paix, a lancé le décret, et qui a eu la sottise de croire qu’il serait impartial dans cette cause, se sont rangés, tous d’une voix, contre Williams, et lui ont par là donné un échantillon de la belle justice qu’il avait à espérer par la suite.

» Larkins, qui ne savait pas le premier mot de tous ces détails quand le papier lui est tombé entre les mains, avait envie d’en profiter pour gagner les cent guinées. Est-ce là votre avis, à vous qui avez maintenant tout entendu ? Pour l’appât d’une misérable somme d’argent, voudriez-vous jeter l’agneau