Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/131

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toutes mes réflexions celle qui avait sans comparaison le plus de poids sur mon esprit, c’était l’idée de la prison, du procès, du supplice. Plus ces objets avaient été depuis longtemps la matière de mes méditations, plus je me sentais invinciblement porté à tout faire pour les éviter. J’avais déjà beaucoup fait dans cette vue ; je m’étais décidé à un grand nombre de sacrifices ; et si je venais à échouer dans mes projets, je ne croyais pas que ce pût jamais être faute de précaution et de courage de ma part. La seule idée du sort que me réservaient mes persécuteurs me mettait à la torture ; et plus je voyais de près l’oppression et l’injustice, plus je me sentais profondément pénétré de l’horreur qui leur est due.

Tels furent les motifs qui me décidèrent à quitter sur-le-champ, brusquement et sans aucun témoignage d’adieu ou de remercîment pour tant de bons offices que j’y avais reçus, une habitation qui, pendant un espace de six semaines, m’avait, certainement, protégé contre les horreurs d’un procès, d’une condamnation et d’une mort ignominieuse. J’y étais entré sans un penny, et j’en sortais avec quelques guinées que M. Raymond m’avait obligé de prendre pour ma part du dividende dans un butin commun. Quoique j’eusse bien quelque raison de supposer que l’activité des recherches suscitées contre moi s’était un peu ralentie par le laps de temps, toutefois la crainte des malheurs qu’un hasard défavorable pouvait attirer sur ma tête me fit prendre le parti de ne pas négliger une seule précaution.

Je songeai à ce papier d’avis qui était la cause