Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/15

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Nous ne pouvons rendre raison des inconséquences et des imprudences d’un homme dont l’esprit est troublé par la conscience de son crime. Vous dites que c’est vous qui avez indiqué vous-même ces malles. C’est extraordinaire ; c’est presque de la démence ; mais à quoi servent les conjectures, en présence de faits incontestables ? Voilà les malles, monsieur ; seul vous saviez où elles étaient, seul vous en aviez les clefs. Dites-nous comment elles contiennent cette montre et ces bijoux. »

J’étais muet.

Le reste des spectateurs ne voyait autre chose en moi qu’un coupable surpris et convaincu ; mais de tous ceux qui étaient présents à cette scène, j’étais, dans la réalité, le plus embarrassé de deviner où devait aboutir cet enchaînement d’étranges événements, et personne n’avait l’air plus stupéfait et plus interdit à chaque mot qui se disait. Cependant l’horreur et l’indignation l’emportaient alternativement. D’abord je ne pus m’empêcher de faire à plusieurs fois des efforts pour interrompre M. Falkland ; mais je fus toujours arrêté par M. Forester, et je sentis alors combien il importait à ma tranquillité future de rassembler toutes les facultés de mon âme pour repousser l’accusation et établir mon innocence.

Tout ce qu’il était possible de produire contre moi étant sous les yeux de l’assemblée, M. Forester, tournant vers moi un regard plein de douleur et de pitié, me dit que, si j’avais quelque chose à alléguer pour ma défense, c’était le moment de le