Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/202

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dans son air. Avant que j’eusse le temps de lui dire un mot, je vis deux autres hommes qui le suivaient. Au premier coup d’œil je devinai quelle espèce de gens c’était ; au second, je reconnus que l’un d’eux n’était autre que Gines lui-même. J’avais su autrefois qu’il avait figuré dans cette profession, et je ne fus pas très-étonné de l’y retrouver. Quoique depuis quelques heures mon esprit se fût, pour ainsi dire, familiarisé avec l’inévitable nécessité de retomber encore une fois entre les mains des agents de la police, cependant il me fut impossible de les voir entrer sans ressentir intérieurement une secousse qui me fit trembler jusqu’au fond de l’âme. D’ailleurs, je n’étais pas peu surpris de l’heure et des circonstances de cette visite, et j’avais grand désir d’apprendre si M. Spurrel avait pu être assez vil pour se faire leur introducteur.

Il ne me laissa pas longtemps dans cette perplexité. À peine vit-il ses deux compagnons tout à fait en dedans de la porte, qu’il s’écria avec un transport presque convulsif : « Tenez, tenez, voilà votre homme ! Dieu soit béni ! Dieu soit béni ! » Gines me regarde aussitôt à la figure avec un air qui exprimait alternativement l’espérance, et le doute. « Sur mon Dieu, dit-il, je ne saurais dire si c’est lui ou non ! J’ai peur, ma foi, que nous ayons mis la main dans le mauvais sac. » Ensuite, comme se ravisant : « Entrons toujours dans la maison, ajouta-t-il ; nous examinerons un peu mieux. » Nous montons tous aussitôt dans la chambre de M. Spurrel ; je pose ma chandelle sur la table. Jusque-là j’avais