Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/236

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que j’avais adoptée, aucune de ces deux professions ne pouvait être une source abondante d’émoluments ; mais si ma recette était faible, ma dépense l’était encore plus. Dans ce petit endroit, je fis la connaissance du vicaire, de l’apothicaire, de l’avocat et des autres personnes qui, de tout temps, avaient été regardées comme la petite aristocratie du lieu. Chacun d’eux réunissait un grand nombre d’emplois différents. À moins de voir le vicaire le jour du dimanche, il aurait été difficile de deviner sa profession. Les autres jours de la semaine, sa main évangélique ne se faisait aucun scrupule de conduire la charrue ou de ramener les vaches des champs à la ferme pour les traire. L’apothicaire faisait au besoin l’office de barbier, et l’avocat était aussi le maître d’école du canton.

Toutes ces personnes m’accueillirent avec une bonne et franche hospitalité. Chez les gens qui vivent ainsi loin du tourbillon des sociétés nombreuses, il règne un esprit de bonhomie et de confiance qui facilite bientôt à un étranger les moyens de gagner leur bienveillance. Dans les divers événements de ma vie, mes manières avaient toujours conservé la simplicité de la vie champêtre, et les traverses que j’avais eu à endurer avaient encore ajouté à la douceur naturelle de mon caractère. Sur le nouveau théâtre où je me trouvais placé, je n’avais point de rival. Ma profession mécanique jusqu’alors n’y avait pas été exercée par un ouvrier à demeure, et le maître d’école, qui n’aspirait nullement aux hautes sciences que je me proposais d’enseigner, était dis-