Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/26

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j’agirai encore de même. Ces attaques impuissantes contre mon honneur n’excitent pas en moi le plus léger ressentiment ; je me ris de la malignité qui les a dictées, et elles n’ont diminué en rien les sentiments de bienveillance que j’ai toujours eus pour celui qui en est l’auteur. Qu’il dise tout ce qu’il voudra, il ne saurait m’atteindre. Il était à propos qu’il fût couvert d’une ignominie publique, afin que d’autres ne pussent être trompés par lui, comme nous l’avons été nous-mêmes. Mais il n’y a aucune nécessité d’aller plus loin, et j’insiste pour qu’il lui soit permis de se retirer partout où bon lui semblera. Je suis seulement fâché que l’intérêt de la société le menace d’une aussi affreuse perspective que celle qui l’attend.

— M. Falkland, répliqua M. Forester, ces sentiments font honneur à votre humanité ; mais il m’est impossible de m’y rendre. Ils ne servent qu’à faire ressortir encore davantage la noirceur de ce reptile envenimé, de ce monstre d’ingratitude qui, après avoir volé son bienfaiteur, cherche encore à l’outrager… Misérable que vous êtes, rien ne peut donc vous émouvoir ? Vous êtes donc inaccessible aux remords ? Quoi ! vous n’êtes pas confondu de tant de bontés si peu méritées ! Vil calomniateur ! vous êtes l’exécration de la nature, l’opprobre de l’espèce humaine, et le moment où vous serez exterminé délivrera la terre d’un fardeau qu’elle ne supporte qu’avec horreur… Souvenez-vous, monsieur, que ce monstre, au moment où vous exercez envers lui un acte inouï de clémence et de bonté,