Page:Godwin - Caleb Williams, II (trad. Pichot).djvu/273

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moi tout à fait, je vous ferais peut-être aller plus vite. Tant que vous le jugerez à propos, vous pouvez vous promener dans l’enceinte de votre prison ; et l’enceinte que veut bien vous réserver votre très-gracieux squire, c’est toute l’Angleterre, avec l’Écosse et le pays de Galles. Mais ne vous avisez pas de vouloir sortir de ces limites. Le squire est bien décidé à vous avoir toujours à sa portée. En conséquence, il a donné ses ordres ; toutes les fois que vous voudrez tenter de vous échapper, je dois faire de vous, au lieu d’un prisonnier au large comme vous êtes, un prisonnier dans la vraie signification du mot. J’ai avec moi un ami qui vous a suivi tout à l’heure au port, et moi, je n’étais pas loin ; au moindre signe que vous auriez fait pour quitter terre, en un tour de main nous étions sur votre dos, et nous vous retenions par les talons. Je vous donne avis pourtant de vous tenir dorénavant à une distance convenable de la mer, de peur qu’il ne vous arrive pis. Vous voyez que tout ce que j’en dis, c’est uniquement pour votre bien. Quant à moi, si je suivais mon goût, je vous aimerais mieux entre quatre murs, avec une bonne corde au cou et un point de vue d’où vous pourriez apercevoir la potence ; mais je fais ce qu’on m’ordonne, et là-dessus, bonsoir. »

Ce message me causa une révolution subite. Je dédaignai de répondre et même de m’occuper le moins du monde de l’infernal démon qui en était porteur. Il y a aujourd’hui trois jours que cette scène s’est passée, et depuis ce moment tout mon